Les individus vivants, milliards
d'hommes, de mouches ou de pissenlits, ne sont que des véhicules. La
vie se fait porter par eux à travers le temps et l'espace.
[…]
La vie apparente, celle de l'individu,
n'est qu'une vie bornée, un fragment temporel qui lui est accordé
pour qu'il puisse accomplir sa mission de porteur.
La vie véritable, perpétuelle, qui se
constitue sans interruption depuis le premier vivant, est celle de
cette substance multipliée dans l'espace et continue dans le temps,
la même chez tous les individus d'une espèce, et peut-être la même
à travers tous les vivants de toutes les espèces, puisque,
lorsqu'on la détruit dans l’œuf, les caractéristiques
individuels, raciaux et spécifiques de l'individu qui naîtra quand
même n'en sont pas affectés, ce qui montre qu'elle est indépendante
de tout ce qui est particulier.
Ce vivant unique et multiple, réparti
à travers tous les êtres vivants, est-il le véritable possesseur
de l'intelligence, de la connaissance et de la conscience ?
Il est certain que :
c'est lui qui fabrique l'homme,
l'agneau et la laitue et pas nous ;
c'est lui qui a construit et mis en
place chaque organe de notre corps, et pas nous ;
c'est lui qui fait battre notre cœur,
et pas nous ;
c'est lui qui continuera, et c'est nous
qui allons mourir.
La Faim du tigre, René Barjavel,
Édition Folio, p. 28-29-30.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire