mardi 30 octobre 2018

La triple conjonction Jupiter-Saturne-Pluton de 2020


La triple conjonction Jupiter-Saturne-Pluton de 2020 passera par plusieurs étapes : 

Pluton conjoint à Saturne (le 12 janvier 2020 à 22° Capricorne), puis trois conjonctions à Jupiter (le 5 avril 2020 à 24° Capricorne, le 30 juin 2020 à 24° Capricorne et le 12 novembre 2020 à 22° Capricorne), suivi d’une conjonction entre Jupiter et Saturne (le 21 décembre 2020 à 00° Verseau).

La conjonction de Pluton à Saturne génère généralement une remise en question des structures importantes. Le Capricorne représente l’autorité, les structures solidement établies (Étatiques, religieuses, associatives…). La configuration se noue dans un signe de Terre (Capricorne) pour se poursuivre dans un signe d’Air (Verseau) et devrait voir l’achèvement d’anciennes structures pour bâtir d’autres concepts et partir sur de nouvelles idées. Par exemple, à l’échelle européenne, certains anticipent une recomposition ou une réorganisation structurelle de l’Union Européenne avec un renforcement des frontières. Sur le plan mondial, c’est également le système de gouvernance qui pourrait être transformé. 

Pour leur part, Jupiter et Saturne (conjonction tous les 20 ans), inaugureront un nouveau cycle social. Alexander Ruperti écrit dans « Les cycles du devenir » (p. 252) que « Saturne consolide et concrétise le genre et la qualité de participation sociale envisagée par Jupiter ». En Verseau, il est fort probable que le numérique et la robotique se développe, le Chine serait d’ailleurs sur un gros projet qui porterait les germes d’une prochaine révolution industrielle. https://www.investigaction.net/fr/made-in-china-2025/
 
À partir de 2026, tous les cycles seront ascendants, ce qui devrait se traduire par un nouveau départ, un nouvel élan. Mais dans quel sens ce renouveau sera-t-il orienté ? 

Nous pouvons ressentir l’énergie Capricorne depuis l’entrée de Pluton dans ce signe, en 2008 amorçant la crise économique mondiale qui s’est transformée en crise sociale (en sauvant les banques privées par l’argent du secteur public). Saturne est ensuite passé en capricorne à partir de 2017 faisant appel à davantage de mesure, de maturité, de structuration et d’une vision à long terme. L’énergie Capricorne rationalise, concentre, pose des cadres, des limites, restreint, temporise, canalise. Elle nous demande de nous responsabiliser, d’assumer les conséquences de nos actes, prône la décroissance, le retour aux fondements, à l’essentiel (valeurs humaines, environnement, sobriété heureuse), quitte à paraître froide, rigide et austère. 
Là vous faites peut-être le lien avec les crises environnementale, sociale et économique, aux réfugiés, au terrorisme, aux ravages du libéralisme ou à la « droitisation » de gouvernements dans de nombreux pays dans le monde ? Oui, vous pouvez, mais cela va au-delà. 

Si bien entendu les effets destructeurs sont pour la plupart médiatisés, l’énergie Capricorne est comme les autres potentiellement exploitable pour permettre d’élever le niveau de conscience universel. Dans son « Triptyque astrologique » (1968), Dane Rudhyar nous explique que la tradition astrologique a fait du Capricorne un symbole d’activité politique, mais que c’est aussi la période de la naissance du Christ. César et le Christ : d’un côté l’organisation d’un empire ou d’une fédération d’États, de l’autre l’Évangile qui donne à la personne une dignité indestructible et une valeur unique. Ces deux modes d’activité coexistent en l’homme, la « nature humaine » résulte de la combinaison de ces deux courants, chacun représentant un « ordre » différent. L'auteur croyait en l’efficacité d’un exemple contagieux : incarner une démocratie en termes d’intégrité personnelle, de responsabilité et d’individualité authentique. Selon lui "plus nous en seront capables, plus d’autres nations se sentiront poussées à suivre notre exemple."
 
En parallèle à la triple conjonction Jupiter-Saturne-Pluton de 2020, nous sommes dans le cycle Uranus-Neptune amorcé en 1992-1993 (également dans le signe du Capricorne) et qui s’étend sur 171 années. En 1978, Alexander Ruperti expliquait dans « Les cycles du devenir » (p.335) que les phases du cycle Uranus-Neptune sont à rapporter aux événements historiques qui ont conditionné le genre de société où nous vivons actuellement. Et il annonçait parfaitement la couleur du cycle : « L’énorme pouvoir du complexe industriel-militaire actuel reflète une concentration de pouvoir rendue possible par la révolution industrielle, technologique et sociopolitique qui a commencé avec le XIXe siècle. Pour le meilleur ou pour le pire, la vie économique, politique et sociale de la moitié de la population du globe se trouve entre les mains d’un petit nombre d’individus tout-puissants. Le cycle actuel Uranus-Neptune, qui a commencé avec la conjonction en Capricorne, est un symbole astrologique particulièrement juste de l’utilisation du pouvoir social pour la glorification personnelle. Le Capricorne se rapporte à la domination de toutes les activités sociales par l’Etat, une corporation, la banque ou par quelque personnage dominant : un dictateur ou dirigeant politique, magnat de l’industrie ou leader d’un syndicat mondial. Comme les deux prochaines conjonctions Uranus-Neptune en 1992 et 2163, se feront aussi en Capricorne, il semblerait que l’usage et le mauvais usage du pouvoir social affecteront l’humanité pour les temps à venir. »
 
Voici un florilège d’informations récoltées sur différents sites plus ou moins meanstreams, qui mises bout à bout, permettent d’entrevoir ce qui se prépare en coulisses à l’orée de la triple conjonction Jupiter-Saturne-Pluton de 2020. 
À ces infos peuvent s’ajouter le Brexit britannique, l’élection de Salvini en Italie, les divers scandales comme les “Panama Papers”, “Swiss leaks”, “Luxembourg leaks” ou bien les menaces d’un nouveau krach boursier mondial imminent.

Europe : Révélation d’une affaire d’évasion fiscale dont sont victimes des États européens, pour un préjudice estimé à plus de 55 milliards d’euros.
États-Unis / Russie : les États-Unis se retirent de leur accord nucléaire avec la Russie D’après le New York Times, le retrait américain de l’INF vise “en partie à permettre aux États-Unis de contrer l’armement chinois dans le Pacifique”. L’accord avec la Russie a empêché les États-Unis de développer toute une série d’armes nucléaires qui auraient pu être déployées dans des zones de tensions du Pacifique. “Comme la Chine n’est pas signataire de ce traité, elle n’a eu aucune limite pour développer des missiles nucléaires de portée moyenne, qui peuvent atteindre des milliers de kilomètres”, explique le quotidien américain. Or les tensions s’accumulent entre les deux pays autour de récifs en mer de Chine que Pékin transforme en bases militaires. De plus, relate le New York Times, “Chine et États-Unis se préparent tous deux à la possibilité d’une guerre dans l’espace”. »
En lien direct avec cette information de 2016… 

Japon : l'armée peut désormais intervenir, sous conditions, à l'étranger. Article dont il faudra se souvenir lorsque les tensions s’accentueront dans le Pacifique, car forcément cela impliquera la Chine qui ne voit pas d'un bon œil une présence américaine près de chez elle (si la poignée de mains historiques entre Trump et Kim Jong-Un est un point positif en soit, elle cache probablement des intentions de l’administration US non avouables). Il faut savoir que depuis l'automne 2015 le Japon a le droit d'intervenir militairement pour défendre ses alliés (c'est-à-dire les États-Unis) en cas de conflit. Et quelle est la bête noire de la Chine ? Comment dit-on "billard à trois bandes" en japonais ? Dans l'hypothèse d'un "Doomsday" prochain, le côté ubuesque de Trump devrait faire oublier l'État profond US aux manettes et les préparatifs dans le Pacifique de ces dernières années (sous la présidence Obama).
D’autres sources disent que l’ONU n’aurait pas accusé la Chine de détenir des musulmans ouïghours dans des « camps» et que ce serait une stratégie US en vue de préparer l’opinion publique : https://www.investigaction.net/fr/non-lonu-na-pas-accuse-la-chine-de-detenir-des-musulmans-ouighours-dans-des-camps/
 
Inde : un futur État 100% hindou ?
Le Premier ministre indien, Narendra Modi fait du Yoga un outil au service de sa politique d'exaltation de l'hindouisme. Yogi Adityanath, moine islamophobe et ministre en chef de l'État de l'Urrar Prash, a déclaré que ceux qui ne souhaitaient pas faire la salutation au soleil pouvaient "quitter l'Inde". « Pour le parti hindouiste qui gouverne l’Inde depuis vingt-quatre mois, se réapproprier le yoga associé à l’hindouisme n’est pas une démarche innocente. Ce parti est soupçonné de vouloir changer la Constitution pour faire de ce pays un Etat hindou, abandonnant la laïcité qui a servi de ciment depuis l’indépendance entre la majorité hindoue et les minorités chrétienne et musulmane. »
Iran : Retrait des États-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien signé en 2015 entre l’Iran et la communauté internationale.
“Le président américain assure, sans donner de preuve ni cibler un point en particulier, que l’Iran ne respecte pas ses engagements – contre l’avis même de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui a assuré le contraire en juin 2017. Il a mis sa parole à exécution, mercredi 8 mai, en annonçant le retrait des États-Unis de cet accord et le rétablissement de sanctions économiques contre l’Iran.”

À côté de ça, la condition des femmes et même des mineurs est toujours aussi difficile comme en témoigne ces deux faits : l’exécution de Zeinab Sekaanvand, victime de violence conjugale et de viols dans un procès inéquitable  
https://www.20minutes.fr/monde/2347851-20181003-iran-victime-violences-conjugales-viols-femme-executee-apres-proces-inequitable-selon-amnesty
Mobilisation sur les réseaux sociaux pour Maedeh Hojabri, une jeune fille de 18 ans arrêtée pour ses vidéos de danse.  
https://www.20minutes.fr/insolite/2307267-20180713-video-iran-mobilisation-reseaux-sociaux-jeune-fille-arretee-videos-danse

Russie : L’exercice de la profession de journaliste est toujours aussi difficile.
Exemple du journaliste ouzbek menacé d’expulsion en Ouzbékistan où il risque la torture.
Lybie : Des marchés aux esclaves filmés par CNN...
L’après Kadhafi est un vrai chaos.
https://www.huffingtonpost.fr/2017/11/15/des-marches-aux-esclaves-filmes-en-libye_a_23278309/

Chine / Israël : Développement d’un projet de nouvelle “Route de la soie” qui permettrait à la Chine de contrôler dans deux ans l’essentiel de l’agro-alimentaire israélien, de sa haute technologie et de ses échanges internationaux.
Israël : Adoption par la Knesset de la loi de « l’État-nation juif » (pour faire la transition avec ce qu’il se passe en Inde)
Israël/Europe : l'Alliance des extrêmes droites
Les connexions entre Israël, la Hongrie, la Pologne, la République tchèque et la Slovaquie existent.
Extrait de l’émission « Spécial Investigation » : https://www.youtube.com/watch?v=izvkNoOdjfA
« Le glissement de l’Europe vers l’extrême droite est irrévocable et ils souhaitent vivement tirer parti et autant que possible du sentiment anti-musulman qui accompagne ce changement. De plus, la détermination de l’UE à étiqueter les produits illégaux de colonisation et le refus de répondre aux appels visant à transférer leurs ambassades de Tel Aviv à Jérusalem poussent Netanyahu à explorer ces nouvelles routes. »

« Le National-Sionisme » selon Hindi Youssef (qui dit que la montée de l’antisémitisme en Europe permet de faire avancer le projet de “Grand Israel” en poussant la communauté juive à faire leur “Aliyah”) : https://youssefhindi.fr/2018/08/07/youssef-hindi-decrypte-le-piege-du-national-sionisme-pour-les-nations-europeennes/?fbclid=IwAR01yEIl_rNEY6vh6KX_pyl9HneoTQdzmzrxXxzjNzxgqcQnlCHB5WEKNvQ

Israël / Arabie-Saoudite : Alliance dans un objectif de reconfiguration du Moyen-Orient
La journaliste Rula Jebreal avait lâché des informations instructives en 2015 https://www.youtube.com/watch?v=0jMGBUmY244
Une alliance qui explique en partie la situation en Syrie, ennemi commun des deux alliés de l’Occident…

Arabie-Saoudite / Indonésie : Le prince Mohammed Ben Salmane, un « ami » qui vous veut du bien.

Arabie-Saoudite / Russie : Assassinat du journaliste Jamal Khashoggi dans le consulat de son pays à Istanbul. Le 2 poids 2 mesures entre le traitement politique de l’affaire Khashoggi et celle de l’empoisonnement de l’ex-agent double russe Sergueï Skripal en Angleterre (quelques jours avant les élections présidentielles en Russie) - qui finalement n’est pas mort - est l’illustration de la propagande anti-russe en Occident.
Pour rappel, l’origine russe de la fabrication poison n’avait pas été prouvé, cependant 144 diplomates russes ont été expulsés de 26 pays.

Brésil : Élection du candidat d’extrême droite Jair Bolsonaro "
“Même s'il admet ouvertement son incompétence en matière économique, Jair Bolsonaro est parvenu à séduire les milieux d'affaires grâce à Paulo Guedes, un "Chicago Boy" ultra-libéral." "Chicago Boy" est le surnom des disciples de l'économiste Milton Friedman, lié au coup d'État de Pinochet au Chili en 1973... (Cf. "La stratégie du choc" de Naomi Klein)

France : Macron au pouvoir, soumission aux lobbys de l’industrie, de l’armement, etc… soumission via l’OTAN aux intérêts des États-Unis et de leurs alliées au Moyen-Orient (Arabie Saoudite, Israël), affaire Benalla, favoritisme envers les plus riches, mépris du peuple, médias aux ordres

jeudi 11 octobre 2018

Prisme

Les hommes du siècle dernier, les atroces barbus des années 80 étaient bien certains d'avoir atteint le bout des connaissances.  Avec l’électricité et l'évolutionnisme, ils tenaient les clés de l'Univers.  Leur raison ne laissait rien dans l'ombre.  Ils étaient certains. 
Les prêtres aussi.  Cela donna lieu aux batailles que l'on sait. 
Aujourd'hui, quelques poils de barbe traînent encore dans les laboratoires, mais les certitudes raisonnables sont envolées. Et les Églises, sentant le vide les ronger par l'intérieur, se rapprochent les unes des autres, comme des poules malades dans un coin du poulailler.  L’œcuménisme, ce n'est pas la tolérance qui l'inspire, c'est l'inquiétude. Ce n'est pas une renaissance qu'il annonce, mais une leucémie.

Et l’homme d'aujourd'hui, lâché par le rationalisme et par l'irrationnel, titube comme un informe à qui on a volé ses béquilles.

Il va falloir qu'il apprenne à marcher.

Ou qu'il tombe.

Ou qu'il s'envole.

La Faim du tigre, René Barjavel, Édition Folio, p. 87.


Note de moi-même :

Le prisme décompose la lumière blanche (unité) en lumières colorées (multiplicité). 
Notre dimension physique est construite autour de la multiplicité et de la diversité d'ensembles infiniment petits (atomes, cellules) et infiniment grands (planètes, galaxies), ensembles qui sont à l'image des infinies nuances de l'arc en ciel.  En effet, nous ne distinguons pas le passage d'un ensemble à un autre, ni d'une couleur à une autre. Le prisme ce sont nos sens et notre enveloppe corporelle qui nous permettent de percevoir le monde dans cette dimension physique que nous appelons communément "la vie". 
À travers une expérience d'élargissement de notre conscience ou par la mort, nous nous affranchissons du prisme et accédons à une vue globale de la réalité :
la multiplicité des couleurs n'est que pure lumière blanche, tout est interconnecté et la séparation une illusion.

jeudi 20 septembre 2018

Vide

On a calculé que si on réunissait tous les êtres humains vivants de la Terre, et si on parvenait à supprimer le vide de leurs atomes, toutes les particules qui composent l'espèce humaine tiendraient dans un dé à coudre.
Un dé à coudre de particules, et du néant, pour construire trois milliards d'hommes, quel que soit le maçon, il sait tirer parti des briques !
Mais ces briques elles-mêmes, ces particules, ce matériau de base de la matière, sont-elles vraiment bien solides ? Sont-elles enfin quelque chose ? Ma main, mon cœur, le bois de mon bureau, l'épaule de mon fils, peut-on s'appuyer ?
Prudence. Ces particules, ceux qui les connaissent le mieux en sont à se demander si elles ne sont pas seulement des parcelles d'énergie en mouvement. Et si elles ne se divisent pas à leur tour, en particules infiniment plus petites, séparées par du vide, lesquelles particules infiniment plus petites n'ont pas de raison de ne pas être à leur tour composées d'énormément de vide, et de particules qui, si petites soient-elles, peuvent à leur tour ne contenir à peu près que du vide et d'autres particules encore plus petites, plus petites, petites...
Tout cela serait déjà assez effrayant, assez merveilleux, mais il faut ajouter que ces particules sont animées de mouvements si rapides et d'un caractère si particulier que leur position est toujours seulement probable. C'est-à-dire qu'elles ne sont, à aucun instant, ni là ni ailleurs, mais seulement quelque part...
Ta femme, ton cœur, ma soupe, ma main, toi-même... composés de tourbillons de rien qui ne sont jamais là ? Vanité des vanités, dit l'inconnu de l'Ecclésiaste, tout n'est que vanité. Il a peut-être commencé à le dire en sumérien. Peut-être bien avant Babel le disait-il déjà. Puis en araméen, en hébreu, en grec et en latin :
Vanitas...
Dérivé de vanus, qui signifie : VIDE.
La science à son tour vient de le découvrir.

La Faim du tigre, René Barjavel, Édition Folio, p. 68-69.


mardi 11 septembre 2018

Anthropophages

Mais imaginez que des êtres venus du fond des Mondes débarquent un jour chez nous, un jour prochain... On sait aujourd'hui que c'est chose possible. La vie est peut-être un phénomène purement terrestre, mais c'est peut-être un phénomène universel. Dans ce dernier cas, il doit bien exister quelque part des êtres qui sont aussi supérieurs à l'homme que l'homme au mouton à côtelettes. Imaginez qu'ils arrivent, qu'ils nous conquièrent, qu'ils nous goûtent et qu'ils nous trouvent bons ! Il est de règle de penser, chez les hommes qui s'occupent des problèmes de l'espace, que si des êtres d'une intelligence supérieure débarquaient sur la Terre, ils ne seraient animés que de bonnes intentions. C'est une hypothèse bien aventurée.

Le mouton est plus intelligent que l'herbe, et l'homme que le mouton. Résultat ? Une grande supériorité d'intelligence ne peut au contraire que rendre impossible toute émotion de la part du supérieur devant le sort de l'inférieur. La sensibilité féminine s'émeut facilement de l'image de l'agneau égorgé - ce qui n'empêche pas d’ailleurs le gigot - mais la plus tendre ingénue restera indifférente devant l’œuf qui casse pour le jeter dans l'huile bouillante, ou le grain de blé que la meule broie. Ce sont des formes de vie trop inférieures pour qu'elle puisse s'émouvoir de leur destruction. Il se peut qu'il y ait autant de différence entre eux et nous qu'entre nous et le blé, ou seulement entre nous et la vache. Dans ce cas, et si notre absorption est favorable à leur métabolisme, rien ne les empêchera de nous déguster. Nous aurons beau crier, gesticuler, nous plaindre, nous expliquer, ils ne nous comprendront pas mieux que nous ne comprenons les fourmis...

La Faim du tigre, René Barjavel, Édition Folio, p. 60-61.



vendredi 7 septembre 2018

Assassins

Nul être vivant ne peut continuer à vivre s'il ne tue. Le plus tendre des hommes est par procuration un égorgeur d'agneaux, le rossignol est gavé de cadavres d'insectes, la charmante otarie est un gouffre à harengs et le hareng lui-même. Et la gazelle n'est pas innocente. L'herbe qu'elle broute, le bourgeon qu'elle cueille sont vivants. L'assassinat est la nécessité première de la vie. Tout dévore et s'accouple pour fabriquer de nouvelles proies dévorables. La vache exploitée, traite, et qui finir sous le couteau, tend sa vulve au taureau parce qu'elle doit faire des enfants destinés à être à leur tour égorgés. Les poules sans sommeil, sans mouvement dans les cages étroites, sous la lumière électrique ininterrompue, pondent deux œufs par jour. C'est la règle. Plus les conditions sont effroyables pour l'espèce, plus elle est prolifique. Car il ne faut pas que cette branche de vie disparaisse. Il faut que tous les vivants, à tout instant, fabriquent des vivants pour que d'autres vivants puissent les dévorer.

Cela vous fait sourire. Vous pensez que l'homme, lui, au moins, est hors du coup, qu'il a le droit de tout bouffer mais que rien ne le mange ? Vous n'avez donc jamais eu un des vôtres en péril ? Votre femme, votre mère, votre enfant, terrassé par une maladie contre laquelle vous vous demandez si la médecine sera efficace, et qui lui met déjà la mort au fond des yeux ? Cette maladie, c'est une autre forme de vie qui est en train de la dévorer.

La Faim du tigre, René Barjavel, Édition Folio, p. 57-58.


samedi 4 août 2018

Implorer l'Unité

Tu nais, tu vis, tu fais des enfants, tu travailles pour eux, pour les autres, contre les autres, contre les tiens, tu aimes, tu hais, tu te bats, tu es heureux, malheureux, tu manges, tu pleures, heureux au fond malgré tous les malheurs, sans réfléchir, le train t’emporte, tout va, tu vas, tu es assis sur une pierre de vacances ou sur ta chaise de travail…
Et tout à coup, suspendu entre le vent, la marée et le soleil, suspendu immobile abandonné tout seul, tout à coup suspendu brutalement lucide, un instant, un éclair, tu n’es plus dans le coup…
Tout à coup, tu vois le fonctionnement autour de toi. L’énorme prodigieux tourbillon qui entraîne tout et tout depuis des milliards de temps jusqu’au fond des milliards d’éternités, du fond des milliards d’espaces jusqu’au fond des milliards d’infinis. Milliards de milliards de multiples créatures en mouvement, atomes, cellules, individus, étoiles, galaxies, univers, tout en vient et tout y va.
Et toi avec.
Où ?
Un instant, un éclair suspendu, tu as vu. Le temps de comprendre que tu n’es rien, sans importance, nul, moins que zéro. Milliards de milliards de multitudes emportées. Et toi avec, parmi les multitudes de multitudes dont chaque grain a autant d’importance que toi. Ni plus ni moins. Ni moins la patte de mouche ni plus la Lune. Comme la Lune. Comme la Lune, toi, ta famille, humanité, galaxies, univers : zéro, poussière de poussière, rien, rien, dans le Tout.

La Faim du tigre, René Barjavel, Édition Folio, p. 32.


mercredi 27 juin 2018

Union

L'amour est l'oubli de soi.
Il n'a pas besoin d'être partagé, car il ne désire que donner. Mais s'il est réciproque, si chacun des partenaires reçoit autant qu'il donne, alors peut s'établir entre eux une véritable félicité que rien d'intérieur ne menace. L’amour véritable engendre le bonheur vrai. Mais pour que cet amour véritable s'établisse, il faut que les deux êtres qui forment le couple aient des physiologies qui soient en harmonie, des mondes mentaux qui puissent communiquer, des goûts qui s'accordent et se complètent, des désirs synchrones, des éducations semblables ou voisines. Et que chacun d'eux ait suffisamment de qualité d'être pour penser d'abord à l'autre, avant de penser à lui.

Une telle rencontre est rarissime. Elle a, en tout cas, peu de chances de se produire sous l'effet de ce que nous nommons d'habitude l'amour, qui fausse le jugement, rend aveugle à l'évidence et sourd à la vérité, et se fait se précipiter l'un vers l'autre les êtres les moins faits pour se donner réciproquement une satisfaction durable.

[…]

Dans certaines sociétés anciennes ou primitives, c'était le chaman, l'astrologue, le sorcier, le prêtre qui avait la charge des unions. Tout ce qui nous reste de cet usage, c'est la cérémonie du mariage religieux et l'intransigeance de l'Église qui considère que tout mariage fait en dehors d'elle ne vaut rien.

C'était sans doute vrai quand c'étaient ses prêtres qui désignaient les conjoints avant de les unir. Quand le prêtre était la voûte et la lumière d'une petite communauté, quand il savait ce qu'est Dieu, ce qu'est l'homme, et comment on peut connaître l'un par le moyen de l'autre.

Aujourd'hui, religieux ou non, un mariage est une affaire de chance. Nul ne peut s'en mêler. Pour assembler justement deux êtres humains, il fallait connaître les hommes.


La Faim du tigre, René Barjavel, Édition Folio, p. 43-44-45.

vendredi 8 juin 2018

Les véhicules de la Vie

Les individus vivants, milliards d'hommes, de mouches ou de pissenlits, ne sont que des véhicules. La vie se fait porter par eux à travers le temps et l'espace.

[…]

La vie apparente, celle de l'individu, n'est qu'une vie bornée, un fragment temporel qui lui est accordé pour qu'il puisse accomplir sa mission de porteur.

La vie véritable, perpétuelle, qui se constitue sans interruption depuis le premier vivant, est celle de cette substance multipliée dans l'espace et continue dans le temps, la même chez tous les individus d'une espèce, et peut-être la même à travers tous les vivants de toutes les espèces, puisque, lorsqu'on la détruit dans l’œuf, les caractéristiques individuels, raciaux et spécifiques de l'individu qui naîtra quand même n'en sont pas affectés, ce qui montre qu'elle est indépendante de tout ce qui est particulier.

Ce vivant unique et multiple, réparti à travers tous les êtres vivants, est-il le véritable possesseur de l'intelligence, de la connaissance et de la conscience ?

Il est certain que :

c'est lui qui fabrique l'homme, l'agneau et la laitue et pas nous ;

c'est lui qui a construit et mis en place chaque organe de notre corps, et pas nous ;

c'est lui qui fait battre notre cœur, et pas nous ;

c'est lui qui continuera, et c'est nous qui allons mourir.



La Faim du tigre, René Barjavel, Édition Folio, p. 28-29-30.